La forêt m'a toujours été familière avec ses arbres élancés vers le couvert feuillu avec la majesté de leur existence primitive, je la sentais à ma mesure, moi, petite fille à peine plus haute que les racines-échasses entourées de grands pères bienveillants qui me protégeaient de l'insistance du soleil. J'avançais sous le couvert, écartant les grandes pousses, les longues lianes suspendues de là-bas tout en haut. Je m'étonnais de toutes ces plantes qui germent dans l'écorce, sortes d'ananas bariolés ou d'arums à larges feuilles lancéolées et puis ces petites mousses bizarres comme un duvet qui se décolle d'un coup dès qu'on les touche et qui laisse apparaître des galeries creusées par des insectes ravageurs. Je m'émerveillais de ces graines rouges éparpillées sur le sol, grosses comme des grains de café et brillantes comme des bonbons. Je les ramassai tels des trésors et en remplit mes poches et voilà qu'une fleur s'épanouit juste à la hauteur de mes yeux, blanche, délicate, odorante. Elle se balance au bout d'une longue tige molle, presque en arrêt, observatrice, émissaire de ce haut feuillage mélangé de lianes, de branches et d'épiphytes.